Nom : Bernard Otlet et Sandra Dejardin
Age : 65 et 55 ans
Profession (ou profession antérieure) : Bernard est récemment retraité en tant que Secrétaire académique aux affaires étudiantes à l’ICHEC, et Sandra est enseignante en informatique de gestion et Responsable de l’Agrégation à l’ICHEC.
Diagnostiqué de Parkinson depuis: 2015
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vous ?
Bernard : Nous avons trois filles. Nous aimons passer du temps ensemble, être à la maison. Donc le confinement (a cause de Covid-19) nous a peut-être moins affectés que d’autres. J’aime bien cuisiner.
Sandra : Oui, c’est Bernard qui fait la cuisine pour tous les repas de la famille et s’il est vrai que nous aimons être à la maison et regarder de bons films, nous aimons aussi voyager. Bernard s’intéresse beaucoup à l’architecture romane et nous aimons aller en Italie, en France voir des églises, aller au théâtre et au concert. Bien que tout cela soit plus difficile aujourd’hui, à cause de la maladie de Parkinson et du coronavirus, bien sûr !
Quels sont les premiers symptômes de la maladie qui vous ont amené à consulter un médecin ?
Bernard : Les premiers symptômes que j’ai constatés étaient des difficultés à marcher avec le pied gauche qui traînait un peu. J’avais aussi du mal à joindre mes mains et ma posture changeait. Mon écriture, qui avait toujours été belle, est devenue plus petite et de plus en plus difficile à lire.
Quand avez-vous appris que vous aviez la maladie de Parkinson, et comment vous l’a-t-on communiqué ?
Bernard : Je suis allé chez mon généraliste parce que j’avais une asymétrie du côté gauche et une raideur du cou. J’étais seul. Il m’a annoncé que ce serait peut-être la maladie de parkinson. Je ne m’y attendais pas du tout. C’était une surprise totale.
Sandra : Oui, il était parti seul. J’étais sortie faire des courses pour aider Saint Nicolas. Il n’avait pas appelé pour me donner des nouvelles, ce qui n’était pas son genre et ce qui m’a inquiétée. Lorsque je l’ai finalement appelé, Il m’a annoncé au téléphone que c’était probablement la maladie de Parkinson. J’étais vraiment sonnée. Mais il se trouve que, par une étrange coïncidence, j’ai rencontré par hasard une connaissance dont le mari avait également été diagnostiqué et qui m’a immédiatement donné les coordonnées d’une bonne neurologue.
Quelle a été votre première réaction ?
Bernard : Je ne connaissais pas vraiment la maladie et je ne savais donc pas à quoi m’attendre. La seule image que j’avais était celle de quelqu’un qui tremble beaucoup. Mais je ne tremble pas. Je suis plutôt quelqu’un qui a des épisodes de raideur, de rigidité. C’est l’autre forme.
Sandra : Ma première préoccupation était de savoir si c’était fatal ou non. Est-ce qu’il allait mourir prématurément. Grâce au site du Docteur Jeanjean, j’ai vite été rassurée. Pour le reste, je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre.
Comment votre famille et vos amis ont-ils réagi au départ et comment cela a-t-il évolué au fil du temps ?
Sandra : Comme nous n’avions aucune expérience de la maladie, les filles (qui à l’époque avaient 16, 18 et 20 ans) ne savaient pas vraiment comment réagir. Elles ont juste pris la nouvelle et ont continué leur vie normalement. Ce n’est qu’avec le temps, et au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, qu’elles ont dû vraiment faire face. Et soyons honnêtes – je pense qu’il est important d’être honnête – cela n’a pas été sans heurt. Nous nous énervions quand Bernard était trop lent, dans notre chemin etc.. Il ne faut blâmer personne pour cela, mais il est important de ne pas culpabiliser. Maintenant qu’elles sont plus âgées, et qu’elles savent conduire, elles peuvent aider davantage pour les courses, la cuisine. Mais c’est difficile. Pour tout le monde.
Bernard : Oui. J’ai eu des moments difficiles où je cherchais à m’isoler pour cacher mon désarroi.
Notre ainée m’a fait un « cadeau » en orientant ses études d’ingénieur civil vers le génie biomédical. Elle prépare une thèse sur un exosquelette pour aider les parkis à marcher.
Quel est l’un des principaux symptômes de la maladie de Parkinson et quel est son impact sur votre vie ?
Bernard : L’incertitude. Je ne sais pas quand je vais être bloqué, quand une période de rémission va se produire ou combien de temps la crise va durer. Cela rend la sortie, l’indépendance, difficile. Je ne conduis plus de voiture. Je pourrais probablement le faire, mais je ne pense pas que ce soit sûr si je ne sais pas quand je pourrais soudainement ne plus pouvoir bouger.
Sandra : Oui, nous devons tous faire plus maintenant car Bernard ne peut plus faire autant qu’avant. Je fais donc les courses, la paperasserie comme les impôts, les virements, les papiers pour la mutuelle. Je le conduis chez le médecin et le kiné etc., etc. Voyager est aussi plus difficile. Aller au théâtre. Aller au concert. Vous regardez tout avec des yeux différents. La hauteur du trottoir. L’accès aux toilettes des lieux public pour faire une piqure. Nous avons eu une expérience terrible en vacances en Croatie lorsque Bernard est tombé de deux mètres. C’était horrible. Leurs hôpitaux ne connaissent pas la maladie de parkinson. Ils ne savaient pas gérer Bernard et ses prises de médicament.
Comment expliquez-vous la maladie de Parkinson à quelqu’un qui ne la connaît pas ?
Bernard : Votre corps n’obéit plus à votre tête. Tout demande un effort – faire travailler ses mains, parler. C’est frustrant.
Qu’est-ce qu’une « astuce » qui vous aide à soulager un des symptômes de la maladie de Parkinson ?
Bernard : Nous avons eu la chance de trouver une bonne neurologue très rapidement. La neurologue nous a également assez, rapidement fait connaître des techniques/traitements alternatifs.
Sandra : Je rajouterais aussi la sophrologie a aidé Bernard. C’est une technique de méditation active, ou de respiration, de relaxation.
Bernard : J’ai accepté l’intervention Deap Brain Stimulation (Stimulation profonde) en juillet. Il a fallu beaucoup de temps pour trouver le courage de le faire car cela touche le cerveau mais je suis heureux de l’avoir fait. J’ai réussi à diminuer de moitié mes médicaments. Je marche mieux, j’ai une meilleure posture, j’ai moins de périodes d’Off et celles qui se produisent sont moins extrêmes.
Quel est le plus grand défi/ la plus grande difficulté avec la maladie de Parkinson ?
Bernard : Le fait de ne pas pouvoir planifier. Avoir à vivre d’instant en instant. Toujours s’inquiéter.
Sandra : En effet, s’inquiéter et penser à la maladie peut presque devenir une obsession. Tout tourne autour de la maladie. Il peut être difficile de vivre un moment sans qu’elle ne s’impose.
Qu’est-ce qui vous manque le plus maintenant que vous avez la maladie de Parkinson ?
Bernard : Voyager. Avoir une vie en dehors de la maison. Rendre visite à des amis. Ecrire.
Sandra : oui, parce que même aller chez des amis peut être difficile. Des chaises trop basses, des escaliers trop abruptes et mal éclairés ou tout simplement annuler en dernière minute.
Qu’est-ce qui a toujours été un de vos traits de caractère, et comment ce trait de caractère se manifeste-t-il maintenant ?
Bernard : J’ai toujours été très anxieux ce qui s’est plutôt renforcé avec la maladie.
Comment voyez-vous votre avenir ? Qu’est-ce qui vous pousse à aller de l’avant ?
Bernard : Le fait que des recherches soient faites (pour trouver des traitements et un remède), et que les choses continuent d’avancer, ça me donne de l’espoir. Il y a une possibilité que les choses s’améliorent.
Qu’aimeriez-vous que les autres personnes comprennent mieux sur la maladie de Parkinson ?
Bernard : En fait, je suis frappé par le nombre de personnes qui connaissent la maladie de Parkinson parce qu’un membre de leur entourage en souffre. Je pense que je voudrais simplement encourager les gens à essayer d’être empathiques et compréhensifs. Si vous rencontrez quelqu’un qui est en période de ‘off’, soyez calme et patient.
La maladie de Parkinson vous a-t-elle apporté quelque chose de positif ?
Bernard : (après une longue pause) Non, je n’arrive pas à penser à quoi que ce soit de positif.
Sandra : Je dirais qu’il prend mieux soin de lui maintenant. Il marche plus. Il se fait plus suivre par les médecins. C’était pourtant une façon assez brutale d’être obligé de le faire, c’est vrai.
Quels conseils donneriez-vous à une personne qui vient d’être diagnostiquée comme souffrant de la maladie de Parkinson ?
Sandra : Trouvez un bon neurologue. Acceptez le statut de handicap (qui peut être difficile psychologiquement). Créez une bonne équipe de soutien autour de vous avec des professionnels paramédicaux comme un kiné. Trouvez peut-être aussi un psychologue. Et parlez à d’autres personnes qui vivent la même chose que vous, que ce soit le patient ou le conjoint.
Quelle est une devise que vous appréciez particulièrement et que vous essayez de respecter ?
Bernard : « Ne vous laissez pas abattre par la maladie. Gardez l’espoir que les choses s’amélioreront ».
Sandra : « N’abandonnez pas ! »