Née en Afrique centrale, je m’appelle Véronique (63 ans). Je suis l’aînée d’une famille de cinq enfants et mes parents ont fêté, cet été, 65 ans de mariage.
Depuis 23 ans, je partage ma vie avec Thierry, mon compagnon, mon soleil, mon confident, mon amant, mon soutien, mon ami, … et mon mari depuis 10 ans.
Je suis très fière d’être la maman d’une fille formidable, Magali (40 ans) passionnée par son métier de massothérapeute et conseillère en lithothérapie. Elle élève, seule, mes deux merveilleux petits-enfants, Ines (12 ans) et Hugo (9 ans). C’est un bonheur de les accueillir pendant les congés scolaires.
Ma profession d’assistante sociale m’a permis, notamment, de diriger pendant une quinzaine d’années une crèche. C’était un travail tellement enrichissant mais également éreintant.
L’année passée, j’ai été contrainte de prendre ma pension car l’évolution de la maladie de Parkinson ne me permettait plus d’assumer ma vie professionnelle.
J’aime la lecture, la nature, la cuisine, les voyages, les travaux de création manuelle et notamment la mosaïque de coquillages.
Quand avez-vous appris que vous aviez la maladie de Parkinson, et comment vous l’a-t-on communiqué ?
A la suite d’un burn-out, j’étais de plus en plus atteinte de tremblements et mon médecin m’a envoyé faire un check-up chez une neurologue. Après le DaTscan, la réalité s’est imposée : « Vous êtes atteinte de la maladie de Parkinson. »Je ne l’ai pas invitée mais depuis 8 ans, elle rétrécit ma vie.
Quelle a été votre première réaction ? Et dans quelle mesure est-ce que cela a changé avec le temps ?
C’est l’effondrement ! Je cherche à comprendre : pourquoi ? comment ? quelles sont les origines ? quelles sont les conséquences ? Depuis 8 ans, la colère et la révolte m’habitent toujours. Et, je me pose toujours autant de questions sur le temps qu’il me reste avant les dégénérescences inéluctables.
Je suis prisonnière d’un corps qui ne me permet plus de vivre Libre !
Ma seule liberté, c’est de pouvoir compter sur le soutien infaillible de Mi Amor, mon mari.
Quel a été l’impact de la maladie sur votre vie ?
Au début, un infime espoir me fait espérer avec les médicaments, l’hydrothérapie, l’ergothérapie, … je vais combattre cette foutue maladie. La réalité m’a rattrapée : les défaillances de mon corps s’accumulent … impossible de les ignorer.
Je me suis lancée, à corps perdu, dans la mosaïque de coquillages avec les encouragements élogieux de mon entourage. A ce jour, je suis en stand-by, j’ai juste l’impression de « bricoler » pour « oublier ».
Quel est un symptôme de la maladie que vous avez découvert et que vous ne connaissiez pas auparavant ?
C’est la découverte de plusieurs symptômes présents dans mon corps avant le diagnostic ; symptômes qui sont les signes cliniques et les modifications pathologiques de cette maladie : les troubles du sommeil, les dystonies, la constipation, le rétrécissement de mon écriture voire son illisibilité, la diminution de ma concentration, la lenteur des mouvements, le manque d’odorat, la fatigue, les douleurs ostéoarticulaires, …
Comment l’expliqueriez-vous à des personnes qui ne connaissent pas la maladie de Parkinson ?
J’explique que la maladie de Parkinson est une maladie neuro-dégénérative chronique évolutive et incurable. Je mentionne également le fait que 40% des personnes atteintes de la maladie de Parkinson ne tremblent pas. Si j’ai l’occasion, j’insiste en expliquant que cette maladie comprend plus de 200 symptômes et que chaque Parkinsonien en développe quelques-uns avec des intensités fluctuantes et douloureuses propre à chaque individu. Chaque maladie de Parkinson est unique.
Quel est le plus grand défi/ la plus grande difficulté avec la maladie de Parkinson ?
Personnellement, la plus grande difficulté liée à la maladie de Parkinson, c’est la confrontation aux symptômes et aux effets collatéraux importants liés à la médication.
Mon plus grand défi serait de pouvoir faire des projets à long terme. Mon extravagant défi utopique : guérir !
Qu’est-ce qui vous manque le plus depuis que vous avez la maladie ?
C’est très ambigu pour moi. Les contacts sociaux me manquent et en même temps, j’aime être seule en symbiose avec la nature.
Par ailleurs, ce qui me manque beaucoup, c’est une écoute « attentive » pour mon aidant proche, mon mari qui vit des angoisses légitimes et tellement différentes des miennes.
Curieusement, je ne sais pas pourquoi, les services de sa mutuelle ont refusé de le reconnaître comme aidant-proche.
Comment est-ce que vos relations avec les autres ont changé depuis le diagnostic ?
Dans mon entourage, il y les personnes qui comprennent et acceptent la maladie de Parkinson ; d’autres insensibles par méconnaissance et enfin ceux qui sont persuadés qu’il s’agit de simulation. Un tri naturel s’est concrétisé dans mes relations.
Comment les autres vous soutiennent/ pourraient vous soutenir ?
Mon pilier, c’est mon mari. Il est le seul qui connaît mes douleurs et qui les reconnaît sans que je les verbalise. Dans ma vie quotidienne, je ne me plains pas mais, j’aimerais, de temps en temps, trouver une épaule sur laquelle je pourrai pleurer.
Qu’est-ce qu’une ‘astuce’ qui vous aide à soulager un des symptômes de la maladie ?
En fonction de mes douleurs et de mes états d’âme, je me revitalise au contact de la nature : écouter les oiseaux, me promener en forêt, entendre le bruit des vagues, m’asseoir près d’une cascade, savourer les flammes d’un feu de bois, marcher le long d’une plage déserte, nager dans la mer, …
Qu’est-ce qui vous donne de l’énergie ? De l’espoir ?
Il y a l’énergie physique et l’énergie mentale. Tous les jours, je cherche l’équilibre entre ces énergies dans des projets à très court terme.
L’espoir, c’est trouver le remède miracle pour éradiquer cette maladie.
Mon espoir, c’est vivre tout l’année au soleil parce que mes douleurs s’atténuent sous un climat plus clément et mon état d’esprit s’améliore avec une luminosité solaire stable.
Quels conseils donneriez-vous à une personne qui vient d’apprendre qu’elle est atteinte de la maladie de Parkinson ?
A une personne qui vient d’apprendre qu’elle est atteinte de la maladie de Parkinson, je lui conseillerais de :
- ne pas avoir peur de parler de sa maladie
- « bouger » physiquement et intellectuellement
- trouver des thérapeutes empathiques qui ont une bonne connaissance de la maladie
- apprendre à demander de l’aide
- apprendre à apprécier le moment présent
Quelle est une devise que vous appréciez particulièrement et que vous essayez de respecter ?
« Pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prévoir mais de le rendre possible »
— Antoine de Saint-Exupéry
Sans invitation, Parkinson a débarqué dans ma vie. Rapidement, cet intrus a mis au défi ma créativité. La mosaïque de coquillages me permet de chercher, sans relâche, le jour et la nuit, le fragment ajusté.
Parallèlement, je cherche, le jour et la nuit, l’ajustement de mes fragments altérés.
Impossible de résister à cette dynamique créatrice qui me permet de ressentir le plaisir d’être vivante……aussi longtemps que ma cacochymie parkinsonienne restera stimulante.
Véronique (alias Nicky)